C’est en 1923, dans le cadre d’un vaste projet de création d’une station de sports d’hiver à la française initié par la baronne Noémie de Rothschild que les trois premiers trous de golf virent le jour au Mont d’Arbois.

Quand on y pense, c’était fou. Une folie de visionnaire, de femme hors du commun, philanthrope, élégante et athlétique disait-on alors. Dans tous les cas sportive, avec ce que cela supposait d’âme pionnière au début des années vingt. 1920…

Créer une station de sports d’hiver à la française sur les hauteurs de Megève, alors un simple village pastoral, voilà ce que la baronne Noémie, fille de l’historien Eugène Halphen et épouse de Maurice, avait en tête. Habituée jusque-là aux joies hivernales multiples de Saint-Moritz, en Suisse, elle avait le modèle. Son beau-père, le banquier Edmond de Rothschild, dont elle avait touché le cœur, va l’accompagner dans son projet, avec un crédit de départ de 100 000 francs. Ils fondent la Société Française des Hôtels de Montagne et se rendent acquéreurs d’un site exceptionnel, le plateau du Mont d’Arbois : 250 hectares de prairies en pente douce, à l’altitude 1300. Il y a tout à faire. La route d’accès d’abord. Car alors, la montée de Megève au Mont d’Arbois se fait surtout par le site du Calvaire, chemin historique de pèlerinage avec ses quatorze chapelles et oratoires dus au père Ambroise Martin.

L’hôtel Prima, surnommé « le Palace des Neiges » inauguré en 1921, sera le premier des joyaux hôteliers du plateau. Avec une famille Rothschild qui ne cessera ensuite d’inventer et d’innover, avec les « Chalets du Mont d’Arbois » notamment, dessinés par Henri-Jacques le Même. Du baron Edmond, le fils de la « Fée Noémie », avec son épouse Nadine, au couple Benjamin et Ariane de Rothschild à partir des années 2000…

Mais autour de cette évolution historique des « murs », dont le Four Seasons Hôtel Megève, né en 2017 d’un partenariat de valeurs partagées entre le groupe Edmond de Rothschild (anciennement Société Française des Hôtels de Montagne) et le groupe Four Seasons, il y a eu tout ce que la baronne Noémie avait rêvé d’inventer pour que son « Saint-Moritz à la française » rayonne. Dès le début, on parle bien de sports d’hiver au sens large. C’est à un champion de ski suisse, François Parodi, rencontré auparavant au Badrutt’s Palace de Saint-Moritz, que Noémie confie l’animation sportive de l’ensemble : ski, curling, saut à skis au Tremplin du Calvaire… et golf !

18 trous en 1968

Ainsi, dès 1923, l’aristocratie européenne, les personnalités et autres têtes couronnées, se voient proposer 3 trous de golf devant l’hôtel, histoire de ne pas perdre leur swing durant la villégiature d’été. Le golf au Mont d’Arbois est lancé.

Il faut quand même imaginer la singularité de cette pratique, alors en montagne. Car hormis le parcours de Pau (1856), les prémices du golf hexagonal n’apparaissent qu’à la fin du XIXe siècle avec Dinard (1887),Biarritz (1888) ou encore l’Old Course de Mandelieu (1891). Bien sûr, on ne pourra parler véritablement de parcours qu’en 1968, quand Edmond de Rothschild demande au champion anglais sir Thomas Henry Cotton de dessiner un 18 trous qui sortira de la terre de l’ancien alpage et deviendra le premier golf stylisé de montagne en France.

C’est ce golf du Mont d’Arbois que le Mégevan Matthieu Azzolin dirige depuis 2016. À 43 ans, cet ancien membre des équipes de France de ski de bosses, moniteur de ski actif au sein de l’ESF Megève et qui fût responsable sportif au G.C Genève, évoque le Centenaire de 2023 avec émotion. Pas seulement en raison de son implication de huit ans, d’un travail d’équipe « éco-raisonné », sur ce parcours historique qu’il s’agit de « faire vieillir le plus sainement possible ». Pas juste en regardant les mélèzes plantés par François Parodi dans la première moitié du XXe siècle et qui ont encore nimbé de leur or roux le Pro-Am Four Seasons Megève Collection de septembre.

Chaque matin au golf, Matthieu fait face au portrait d’Edmond de Rothschild posé sur son bureau… Il repense alors aux fameux Pro-Am des 13-14 juillet : « On se battait pour en être ! » Ou aux 19 éditions passées de la Winter Golf Cup, événement unique de golf sur neige soutenu à partir de l’année 2000 par Ariane et Benjamin de Rothschild : « Il faut qu’on fasse la 20ème! » Alors, il arrive que le directeur Azzolin s’adresse à celui que Megève appelait « Edmond d’Arbois » : « Merci à vous ! C’est grâce à vous si on est tous là aujourd’hui ! »

N.V